Au début, le tout manuel

Dès 1865, c’est d’abord naturellement sur l’hippodrome que Joseph Oller organise la prise de paris où il n’est pas question de totalisateur ou de terminaux de saisie puisque tout se fait à la main. À l’époque, ni les télécommunications, ni les moyens de saisie et de centralisation ne permettaient une quelconque automatisation. Pourtant, les pionniers ont montré que l’on pouvait mettre le pari mutuel à portée de la plus grande masse, sans avoir recours à la technologie. Le premier système de pari mutuel est constitué de blocs-compteurs, l’équipement mobile d’un guichet pesant 300 kg. Quelques années plus tard, en 1888, Albert Chauvin, après avoir été salarié pendant quelques mois du Pari mutuel Oller, démissionne et dépose le brevet d’un système qui est bientôt reconnu comme plus rapide et plus sécurisé que le système Oller. En 1891, les deux tiers des sociétés de courses feront appel à sa compagnie. Bien plus tard, en 1952, le système manuel Chauvin sera amélioré par André Carrus, son gendre, et Pierre et Jacques Carrus ses petits- fils, afin, notamment, de pouvoir être plus facilement transporté d’un hippodrome à l’autre. Enfin, en 1957, trois ans après le lancement du pari Tiercé et alors que celui-ci connaît un développement considérable, André Carrus met au point, toujours avec ses fils, un bel exemple de système à activité répartie et à traitement différé, système qui permet de traiter principalement les paris collectés dans les réseaux de paris pris en avance. Le bordereau encoché à volets carbonés, la pince à encocher, la valideuse à main, les aiguilles à trier ont servi les turfistes du dimanche matin pendant plus de 30 ans. Entièrement manuel jusqu’en 1987, le réseau du PMU en France devait sa réussite à une organisation rigoureuse. Acheminer et dépouiller les données à temps, éviter les erreurs, déjouer les tentatives de fraude, tel était le challenge journalier.

Les systèmes mécaniques et électromécaniques

En 1913, G. Julius met au point le premier totalisateur automatique au monde à Auckland avec trente terminaux. Plus tard, il fonde la société Australienne A.T.L (Automatic Totalisator Limited). Le totalisateur est principalement constitué d’unités électromécaniques additionneur-compteur-afficheur, à raison d’une unité par cheval et par pari, capables de cumuler chacune plusieurs centaines de mises à la seconde. Un additionneur met en œuvre un ou plusieurs axes dotés de trains d’engrenages coniques épicycliques mus par des ressorts hélicoïdaux. Le mouvement de ces engrenages est déclenché par des roues à échappement, leur commande électromagnétique est excitée, via un scanner électro-mécanique, par la sélection d’un numéro de cheval sur l’un des terminaux de vente. En 1928, ATL déploie son totalisateur sur l’hippodrome de Longchamp. Avec 270 terminaux, c’était le site le plus important jamais automatisé. Les terminaux ATL, qui jusqu’alors ne pouvaient prendre qu’un type de pari par guichet, ont été adaptés pour vendre des tickets Gagnant ou Placé sur la même machine. Développés par ATL, ils ont été fabriqués en France sous son contrôle.

1930 - Le PMU

Depuis la loi du  autorisant le pari mutuel, on ne peut parier sur les courses de chevaux que sur les hippodromes. Ceux qui ne peuvent s’y rendre sont placés devant l’alternative : ou s’abstenir, ou confier leurs paris à des « bookmakers » agissant illégalement. Le prospère commerce des paris clandestins, dont la répression s’avère difficile, ne fait pas l’affaire des sociétés de courses organisatrices, ni de l’État, tous deux privés d’importants revenus leur échappant. Et cette situation inquiète plus que jamais un milieu agricole directement concerné, celui de l’élevage, destinataire d’une part des prélèvements sur les paris. On s’accorde enfin pour combattre les clandestins, le meilleur moyen étant de les concurrencer sur leur propre terrain, c’est-à-dire en ville. Le débat est ouvert au printemps 1930. Faut-il permettre l’enregistrement des paris sur les courses en dehors des hippodromes ? Opposants : les défenseurs de la vertu et d’une certaine morale. Favorables : les pragmatiques. On ne peut empêcher les gens de parier. Permettons leur de parier hors des hippodromes. L’élevage et l’État percevront des recettes supplémentaires qui leur échappent jusqu’alors. Pour ce faire, il suffit de supprimer six mots « sur leurs champs de courses exclusivement » figurant dans l’article 5 de la loi du  autorisant le pari mutuel. Cette suppression est votée par la Chambre des députés le . Ainsi la loi de finances du  (article 186) permet l’extension du pari mutuel hors des hippodromes. La conception du pari mutuel urbain est reconnue officiellement par un décret publié le . Les sociétés organisatrices de courses, tout en gardant la haute direction, décident de confier l’organisation matérielle du pari mutuel urbain à une gérance réunissant des spécialistes (trois représentants de la Société Oller et André Carrus du Pari mutuel Chauvin) dont elles utilisent déjà les services sur les hippodromes.

PMU et les courses

La consultation de volumes du Sport Universel Illustré, ancêtre de L'Équipe, nous apprend que jusqu'aux années 1900, ce qui correspond à peu près à la montée en puissance des sports olympiques (dont la première célébration sera organisée à Athènes en 1896), et jusque dans l’entre-deux-guerres, l'hippisme était le sport par excellence. Un sport bourgeois, certes, au même titre que la chasse ou la voile par exemple, mais public : on ne concevait plus d'organiser des courses à huis clos. Le public, et le jeu, accompagnaient immanquablement les manifestations de ce type. Le produit des prélèvements sur les enjeux (notamment au pari mutuel) permet de financer toute la filière. La rétribution des courses permet à des propriétaires modestes d'espérer rentabiliser leur investissement, au moins de percevoir une partie de leur investissement. Sans ces allocations, tous les bons chevaux seraient concentrés dans les mains de quelques écuries super puissantes.

Trot et galop : un monde de différences

En France, le programme des courses est réparti entre deux disciplines très différentes l'une de l'autre : le trot et le galop. Chaque allure a sa tradition, son monde et ses règles propres.

Le galop a précédé le trot dans les annales de l'hippisme parce qu'il allait de soi : un cheval atteint le maximum de sa vitesse au grand galop, une allure naturelle qui lui permettait, à l'état sauvage, d'échapper à ses prédateurs. Lorsqu'au xviiie siècle, les Anglais se sont les premiers concentrés sur un élevage spécifique à la course au galop, en croisant des pur-sang arabes, des barbes et des étalons orientaux à des juments désignées pour cette activité par leurs qualités propres, ils ont créé le pur sang (le Thoroughbred, dont la traduction la plus exacte est « élevé dans les règles »), la race la plus rapide au monde.